Sur la scène
Sur la scène y a le silence tout habillé de noir
Sur la scène y a une pute avec des yeux abstraits
Sur la scène y a le vent qui me raconte des histoires
Sur la scène y a mon cœur qu'est prêt à chavirer
Sur la scène y a ta voix qui me revient d'outre-mer
Sur la scène y a ton ventre et j'y meurs chaque soir
Sur la scène y a ton style et tes façons de le faire
Sur la scène y a l'amour et mes façons d'y croire
Sur la scène y a mes clopes que t'allumes à ton slip
Sur la scène y a mes sous qu'on balance comme des cons
Sur la scène y a des voiles qu'on prendrait pour tes nippes
Sur la scène y a que dalle avec quelques chansons
Sur la scène y a la mer qu'on prendrait pour la grève
Sur la scène y a du faux qu'on prendrait pour de vrai
Sur la scène y a le soleil qui a le droit de grève
Sur la scène y a un mec qui s'est pas maquillé
Sur la scène y a l'automne et Dullin qu'on emporte
Sur la scène y a l'hiver et Molière qui fout le camp
Sur la scène y a le mois de mai qu'attend derrière la porte
Sur la scène y a l'été qu'est mort voilà deux ans
Sur la scène y a l'Espagne qu'attend depuis quarante
Et qui fabrique des mômes pour se sentir moins seule
Sur la scène y a Danton, le cœur sur la détente
Tout prêt à refoutre la merde avant qu'on referme sa gueule
Sur la scène y a Karl Marx et Wall Street dans sa traîne
Sur la scène y a la Bourse et l'âme des pauvres gens
Sur la scène y a la vie et l'espoir qui se traîne
Et la mélancolie qu'a pas fait toutes ses dents
Sur la scène y a mon cœur qui bat ses camarades
Et ma môme en coulisse pour bien se rappeler
Sur la scène y a le diable encore au Hit Parade
Et qui bat les Beatles de quelques Variétés
Sur la scène y a des mots qui ne demandent qu'à se placer
Sur la scène y a des airs qu'ont l'air de n'en pas avoir
Sur la scène y a la guerre et des fois y a la paix
Sur la scène y a tout ça et y a même un anar
Sur la scène y a des gosses qui font le mois de marie
Et qui mettent des pavés dans le tronc des connards
Sur la scène y a Jésus qui fume des Maruhani
Qui se prend pour un beatnik avant de finir au quart
Sur la scène y a ma joie maquillée en musique
Sur la scène y a mon job qui a tout juste vingt ans
Sur la scène y a Paname et sa claque et sa clique
Sur la scène y a Pokol qui me traîne depuis douze ans
Sur la scène y a une ombre qui m'a fait des souvenirs
Sur la scène y a Pépé qui m'attend dans son trou
Sur la scène y a des mains qui battent des sourires
Dans la salle y a le public
C'est notre théâtre à nous