LA BELLE INDUSTRIE
la belle industrie nous redonne la foi en l’avenir
offre au monde un tout nouveau visage
écoutez le concert des machines
frôlez les alliages vernis
admirez ces ingénieux rouages
l’usine à mon père n’est pas à mon père
maman m’a inscrit à l’école publique
la belle industrie qui étire ses murs en dents de scie
sous de grands chapelets de nuages
voilà dans quel décor je grandis
je ne veux jamais partir d’ici
je m’épanouirai dans son sillage
la maîtresse a dit mon toto
ça va pas, faut viser plus haut
que diraient ton père et ta mère
les sacrifices, des mots en l’air
tu vas t’appliquer, ta copie
tu la refais avant midi
creuse-toi le citron sinon, c’est un zéro sous le prénom
j’suis pas instruit, j’ai pas les beaux habits
pour les autres c’est facile, pour moi, très difficile
j’ai pas les goûts, ni le tact, le sens de l’humour
qui convertit les foules pendant les interviews
la belle industrie, les gros catalogues des trois suisses
de la redoute et de manufrance
eh puis grâce à 1936
on a le droit de faire du camping
dans une forêt de caravanes
l’usine à mon père n’est pas à mon père
maman m’a inscrit à l’école publique
qui fabrique les avions, les jouets pour les p’tits, les tas de choses
qu’on repère dans les réclames du soir
l’industrie, c’est la vie, elle est comme elle, grande et fière
j’espère qu’un jour j’aurai mon casier au vestiaire
elle garantit un avenir meilleur
et pas seulement pour les trois meilleurs
elle garantit un avenir meilleur