Les Chibanis
Ce qu’ils ont au fond de l’assiette est si petit
Qu’on leur dit pas, tu leur dis pas bon appétit
C’est une soupe à la grimace, comme des larmes qu’ils ramassent
Qu’ils boivent et qu’ils gardent pour eux
Vu que tout est dit au fond d’eux
Une cuillère un tabouret
Un rideau rien de coloré
C’est qu’on fait pas dans la couleur quand t’as vécu dans la douleur
Ils vivent quand tout est fini
Et meurent sans cérémonie
Ce sont les vieux nos anciens
Ce sont les deux réunis
Ce qui nous laisse démunis
Le soir quand on se réunit
C’est qu’on a oublié la compagnie des Chibanis
Ils ont des souvenirs si flous
Qu’ils les accrochent avec des clous
Et quand il pleut averse, toutes les gouttes les traversent
Ils sont dans les livres d’Histoire comme nous dans une passoire
Comme l’oiseau perdu eu gré
Du vent qui veut pas de regret
Ils vont et viennent à la merci d’un casse-toi ou d’un merci
Qu’ils soient fils ou qu’ils soient parents
Ils meurent une fois par an
A chaque fois qu’une naissance, marque d’une croix leur absence
Ils en écrivent des phrases et ça efface pas l’ardoise
Pendant qu’ils s’endorment ils s’éteignent
Après un petit coup de peigne
Et tranquillement disparaissent dans l’attente d’une caresse