ON DIRAIT QU’ C’EST TOI
Je t'écris ces quelques lignes
Pour t'avouer,
Bernard, qu'je n'fus pas des plus malignes
En t'faisant cornard,
J'croyais rencontrer un ange
Dans l'petit Eloi,
Mais j'nai gagné au change :
On dirait qu' c'est toi !
Chez nous, à la moindre qu'relle,
Etant mon époux,
T'avais l'droit d'm'app'ler : "Saut'relle !"
Et moi d'filer doux.
Lui qui n'a mis son paraphe
Su' rien d'vant la loi,
Y m'appell' tout d'mêm': "Girafe ! "
On dirait qu' c'est toi !
Yn' prononc' pas deux mots d'suite
Sans s'glorifier d'eux;
Tous les jours y prend un' cuite,
Quand ce n'est pas deux.
Il est amoureux d'sa tête,
Je m'demand' pourquoi ?
Il est vantard, il est bête :
On dirait qu' c'est toi !
C'n'est pas, d'après ma peinture,
La crèm' des amants,
Mais, s'lon la température,
Il a de bons moments.
Dans ses élans de tendresse,
Heureux comme un roi,
Quand sur son coeur il me presse,
On dirait qu' c'est toi !
Moi, quand il est en ribotte,
Je trouv' plein d'appas
Le premier voisin qui m'botte
Ou qui n'me bott' pas.
Mes escapad's n'ont pas d'bornes,
J'te l'jur' sur ma foi,
Quand y sort avec ses cornes
On dirait qu' c'est toi !
Malgré sa musculature
y n'fait pas chaqu' jour
Honneur à sa signature
Au point d'vu d'l'amour.
Quand nous taillons un' bavette
Sur n'importe quoi,
Y reste en panne au plus chouette...
On dirait qu' c'est toi !