Nous sommes des conquérants
Quelque chose en soi de brisé
Qu’on aimerait remettre en marche
Une insouciante vanité
Et cet orgueil dans la démarche
Ces défauts qu’on a tant haïs
Dont on s’est défait à grand’ peine
En se donnant des leçons de morale
On se rend compte un peu surpris
Qu’ils nous allaient bien tout de même
Et qu’on devient affreusement banals
On a labouré sans ardeur
Ces champs que l’on croyait incultes
En se forçant à contrecœur
À devenir un peu adultes
Le gris qui passe sur nos tempes
Nous rendrait-il plus responsables
Comme on se force à le croire si tôt
Ou bien désigne-t-il la pente
Que nous dégringolons minables
Et qui nous pousse vers notre tombeau
Jusqu’à notre chère tristesse
Qui a perdu tout son arôme
Même l’éternelle maîtresse
Se détourne donc de son homme !
Nos amitiés et nos plaisirs
Prennent des goûts de cauchemar
À être devenus si prévisibles
Mais quel voile est venu ternir
Notre vie d’un grand écran noir
Qui étend une nuit irréversible ?
Et nous étions des conquérants
Mais n’avons jamais rien conquis
Faute de savoir quels forts assiéger
Nous retournerons au néant
Honteux de n’avoir accompli
La mission pour laquelle on était né