L'omnibus de Coucy-les-Coucous
Dans mon village, il n'y a plus d'autocar
Oui, mais l'ancien omnibus de la gare
Tout disloqué, tout démantibulé
A r'commencé à rouler
Un vieux malin qui l'a payé vingt francs
Trimballe dedans les ballots et les gens
Dans l'omnibus de Coucy-les-Coucous
Quand y a trop d' monde, il faut s' tenir debout
Y a plus d' ressorts, ce qui fait qu'à chaque bond
On s' cogne le crâne au plafond
Des deux côtés, les carreaux sont cassés
Les jours de pluie, alors, on est saucé
L'hiver, on gèle, on est ratatiné
Et l'on a la goutte au nez
Des villageois montent à chaque pays
Avec une tapée d' ballots et d' colis
Sous les banquettes, faut loger des tonneaux
Et sur ses g'noux un p'tit veau
Les escargots s' débinent de leur panier
Et viennent en douce baver sur vos souliers
Dans l'omnibus de Coucy-les-Coucous
On se sent tous solidaires d'un seul coup
Y a la fermière avec ses camemberts
Qui vous en lâche un p'tit air
On lève la tête, disant "Ah, c' que ça pue !"
Pan ! Une valise vous tombe sur l'occiput
Et comme il y a des chiens dans l'omnibus
On ramène un boisseau d' puces
Les pauvres chevaux sont poussifs et cagneux
Ils ont bien cent cinquante ans à eux deux
Alors, ils s'arrêtent dans tous les patelins
Chaque fois, devant l' marchand d' vin
L' cocher s'envoie deux pastis, des fois trois
Quand il remonte, il a les yeux d' guingois
Dans l'omnibus de Coucy-les-Coucous
On ne lui reproche pas de boire un coup
Mais dans l'espoir d'arriver jusqu'au bout
On lui fait tous les yeux doux
Ça n' sert à rien ! L' malheureux qui a trop bu
Dans un fossé fait verser son tape-cul
Aussi, l' plus sûr, au lieu d' prendre l'omnibus
C'est d' s'en aller pedibus